En attendant la mer est une proposition de médiation culturelle des paysages littoraux sous l’effet du
changement climatique. Elle désire interroger et sensibiliser un large public sur la notion de « grand
littoral » avec cinq parcours en Vendée et en Charente-Maritime.
Pourquoi avoir choisi d’intervenir à cheval sur la Vendée et la Charente-Maritime ?
Le 10 février 2010, l’événement Xynthia a durement frappé la façade atlantique et plus particulièrement les départements de la Vendée et de la Charente-Maritime. Après un demi-siècle de rémission climatique, cette tempête doit être considérée comme un signal faible de ce que pourrait être ce littoral dans l’avenir, tel qu’il pourrait être soumis à une transgression marine si les défenses côtières se révélaient insuffisantes. Xynthia n’est pas à proprement parler un effet du changement climatique - il y a eu par le passé des tempêtes bien plus féroces - mais ses conséquences nous ont données à voir le drame que pourrait occasionner l’élévation du niveau de la mer si rien n’était fait pour réduire la vulnérabilité de l’urbanisation littorale.
Les zones touchées directement, appelées zones de solidarité, ont fait l’objet localement d’intenses débats et confrontation entre la population et les pouvoirs publics. Le changement des mentalités y est visible : la désurbanisation a laissé place à un changement d’aménités où le littoral n’est plus habité mais renaturation au bénéfice du plus grand nombre. À plus grande échelle, il s’agit maintenant d’adapter ce littoral très spécifique aux conséquences prévisibles des effets du changement climatique.
Nous pensons que le débat doit désormais prendre en compte un territoire plus vaste que la bande littorale pour engager des réflexions de recomposition spatiales plus pertinentes. Avant les projets, il faut commencer par une sensibilisation sur les conséquences littorales du changement climatique et le périmètre à prendre en compte.
La révélation des anciens rivages
En reprenant la portion de façade la plus touchée par Xynthia, allant de la Faute-sur-Mer au nord à Rochefort au sud, nous remarquons les traces d’anciens rivages parfois loin dans les terres, preuve de la mobilité du trait de côte. Il s’agit souvent d’îles où de rivages érodés mais aussi de falaises abruptes. Il n’en fallait pas plus pour y localiser notre proposition : révéler les anciens rivages par une médiation culturelle pour faire naître un débat sur l’épaisseur du littoral à prendre en compte dans la réflexion sur une recomposition territoriale.
Les paysages culturels
Les paysages littoraux et de l’arrière-pays sont fortement anthropisés et les représentations que nous nous faisons d’eux sont d’ordre culturel. En prévision du déplacement important du trait de côte sous l’effet conjugué de l’érosion et de la montée du niveau de la mer - et plus généralement de la transformation des paysages sous les effets combinés du changement climatiques - il nous semble pertinent d’adopter une approche culturelle qui rapproche des considérations scientifiques de préoccupations sociales.
Une médiation culturelle pour nourrir le débat
La proposition En attendant la mer est simple : engager le débat sur la transformation des paysages culturels en prenant comme point d’appui cinq parcours à proximité des anciens rivages. Pour ce faire, nous comptons réaliser quatre actions qui se complètent. Une phase dite exploratoire (1) en réalisant ces cinq parcours avec des artistes et scientifiques (un couple artiste scientifique par parcours). L’artiste invité aura la possibilité de ponctuer le parcours qu’il a fait de deux à trois interventions plastiques (2) pour incarner sa propre sensibilité face aux enjeux relevés lors de la phase précédente. Un guide de voyage livre d’artistes (3) à destination du grand public sera réalisé en décrivant les parcours et les œuvres réalisées pour l’occasion, mais surtout en retranscrivant le dialogue initial du couple scientifique artiste. Nous assurerons une double médiation (4), tout d’abord en présentant régulièrement le travail en progression et ensuite en réalisant les parcours avec un public scolaire.
Type : recherche urbaine et médiation culturelle
Objet : dialogue entre sciences et art contemporain
Date de réalisation : 2016
Lieu principal de réalisation : Charente-Maritime et Vendée
Commanditaire : appel à idées du PUCA "Imaginez le littoral de demain"
Structure porteuse du projet : villefluctuante
Auteurs : Stéphanie Barbon (programmatrice) et Jean Richer (urbaniste)
L'appel à projets Imaginez le littoral de demain
La proposition En attendant la mer est simple : engager le débat sur la transformation des paysages culturels en prenant comme point d’appui trois itinérances à proximité des anciens rivages.

Objectifs de recherche et de création
Il s’agit avant tout d’organiser, selon un protocole simple, la pluridisciplinarité des approches et leur fertilisation mutuelle. Il existe là un premier objectif de compréhension et d’interprétation.
En matière de mobilité du trait de côte, le projet En attendant la mer prend le parti de regarder dans le passé pour mieux préparer l’avenir. Partir des archives sédimentaires qui témoignent de l’évolution du trait de côte et de la polymorphie à l’échelle des derniers millénaires permet de mettre en perspective des débats très actuels sur l’avenir du littoral sud atlantique. L’interprétation qui en sera donnée permettra une mise lumière sous un nouvel angle des résultats de recherche. Elle permettra aussi une médiation vers un plus large public.
La portion du littoral atlantique concerné fait actuellement l’objet d’un âpre débat public dans un contexte d’érosion et de changement climatique. La présente proposition vise à apporter un regard à la fois distancié et sensible sur la question de l’avenir de l’occupation humaine littorale. Le troisième objectif est de participer au débat public en proposant différents livrables pouvant faire l’objet d’une large diffusion.
Livrables et valorisation
Le livre de retranscription des itinéraires sera accompagné d’un préambule expliquant les objectifs du projet. Il comprendra la retranscription des dialogue à proprement dit accompagné de photographies des itinéraires et de compléments scientifiques vulgarisés. Pourquoi une édition papier ? Pour fabriquer un manuel pratique que l’on emporte sur le terrain, mais aussi un livre d’art ou les propos théoriques croisent l’expérience physique et sensorielle des promeneurs. Il nous importe que ces derniers comprennent en voyant, que l’expérience physique des lieux leur fasse comprendre la problématique complexe du changement climatique et fasse changer leur regard sur les paysages.
Nous assurerons une double médiation, tout d’abord en présentant régulièrement le travail en  progression et ensuite en réalisant les parcours avec un public scolaire.

Méthodologie de collaboration entre artistes et scientifiques
 
1  Le protocole imaginé par En attendant la mer se fonde sur une idée très simple : employer la méthode dite des itinéraires pour faire naitre un dialogue interdisciplinaire. Il s’agit d’entretiens non directifs et d’un dispositif fondé sur un rapport de confiance qui s’établit lors des rencontres successives.

La méthode des itinéraires développée par le sociologue Jean-Yves Petiteau consiste à suivre une personne dans un espace pendant qu’il raconte son territoire tout en déambulant. Suite à ce parcours, les accompagnants construisent ensemble une sorte de « roman-photographique » qui témoigne du récit de la personne.
Cette méthode va être adaptée au contexte (passage de l’urbain au littoral) et au projet (dialogue science et art) de la manière suivante :
❛ Un travail préparatoire sera réalisé entre le laboratoire et l’association villefluctuante pour définir les enjeux de l'itinérance.
❛ À la date convenue, le scientifique et le photographe se retrouvent sur le site choisi pour 3 à 4 heures de déambulation et ils seront accompagnées de l’association villefluctuante pour la prise de son à l’aide d’une perche durant la déambulation.
❛ L’itinéraire ne sera pas défini à l’avance ; il sera « inventé » sur place par le scientifique et le photographe.
❛ Le couple chercheur et photographe ne se découvrira pour la première fois que lors de la journée d’exploration.
❛ À l’issue de l’exploration, le même jour, une discussion entre le chercheur, le photographe et villefluctuante ouvrira le débat sur la problématique contemporaine de déport du trait de côte et de ses conséquences pour les populations littorales.

 2  En construction...

 3  Une retranscription de chaque itinérance et des rencontres sera effectuée par villefluctuante. Il ne s’agira bien entendu pas de mettre tout ce qui aura été enregistré mais de mettre en scène le dialogue art et science tout en lui conservant sa spontanéité. Le récit rencontrera la photographie.

 4  L’ensemble des documents - les textes introductifs, les retranscriptions, les photographies - sera organisé pour former une trame narrative dans le guide.

À la fin de chaque parcours, une exposition temporaire sera organisée. Une conférence est prévue avant chaque vernissage pour présenter le travail réalisé. Elle exposera le « making off » du projet car pour nous le processus est aussi important que le résultat.

Les trois itinérances du projet En attendant la mer ont eu lieu. Dans la lignées des dérives psychogéographiques, elles nous ont menées sur trois anciens rivages de la côte atlantique. Ce fut aussi un voyage dans le temps : successivement moins 200 millions d’années, moins 6 000 ans et (seulement) moins cinq cents ans.
Itinérance #1
Chaillé les Marais
(Vendée)
17 février 2017
Itinérance sur une ancienne ile du golfe des Pictons, à Chaillé les marais. Une visite dans le temps de 195 millions d’années en arrière mais aussi tournée vers demain.
Avec :
Eric Chaumillon, géologue, professeur à l’Université de La Rochelle
Bernard Renoux, photographe auteur
Valérian Dénéchaud, « Vous êtes ici », éducation à l'environnement urbain et sensibilisation à l'architecture, à la ville et aux territoires
Stéphanie Barbon, programmatrice en art contemporain
Jean Richer, architecte géographe
Itinérance #2
Soulac sur Mer
(Gironde)
10 juin 2017
Itinérance sur la plage de l'Amélie où le sol révèle une paléo-forêt, des traces d'occupation humaine vieillent de 6 000 ans et où les blockhaus font une baignade forcée du fait du recul du trait de côte.
Avec :
Frédérique Eynaud, paléoenvironnnementaliste, professeure à l’Université de La Rochelle
Sébastien Zaragosi, géologue, professeur à l’Université de Bordeaux
Camille Hervouet, photographe
Patricia Cartereau, plasticienne
Stéphanie Barbon, programmatrice en art contemporain
Jean Richer, architecte géographe
Itinérance #3
Brouage
(Charente-Maritime)
26 juillet 2017
Cette itinérance nous a fait remonter de quelques siècles en arrière, du temps où le commerce du sel était florissant et où Brouage avait un rôle militaire avant que la mer ne s'éloigne définitivement. 
Avec :
Thierry Sauzeau, historien, professeur à l’Université de Poitiers
Grégory Valton, photographe
Valérian Dénéchaud, « Vous êtes ici », éducation à l'environnement urbain et sensibilisation à l'architecture, à la ville et aux territoires
Aurélie Berger, inspectrice des sites de la DREAL Nouvelle Aquitaine
Stéphanie Barbon, programmatrice en art contemporain
Jean Richer, architecte géographe
Ile du Héron
Pour fêter la reprise de notre projet En attendant la mer, Nous avons organisé un pique-nique en mai 2018 dont le but était de découvrir l'Île du Héron aux portes de Nantes. Cette île sauvage au cœur d'une métropole nous a fasciné.
repérage dans l'archipel des Pictons
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