Quelques accidents en introduction...
Accident de terrain
Char Renault en terrain accidenté (1918)
Géopolitique de l'inattendu
Situation Room, Washington (2019)
Accident pictural
Marthe et Marie-Madeleine, Caravage (1598)
L'accident du moteur
Gare Montparnasse (1895)
Accident technologique
Lubrizol (2019)
L'accident s'opposant à l'essence
La philosophie aristotélico-scolastique de Saint Thomas d'Aquin (1224 -1274)
Webinaire du 2 avril 2021
Dromosphère
Géopolitique de la vapeur et généalogie de l’accident au XIXe siècle
L’imposition à partir du 19e siècle d’un nouveau système énergétique fondé sur la puissance des machines productives et des combustibles fossiles a inauguré une nouvelle ère du risque et de l’accident. En revenant sur la façon dont les accidents ont modelé la genèse des sociétés thermo-industrielles et technicienne du xixe siècle, comment ils ont été peu à peu naturalisés à travers un fatalisme prométhéen et industrialiste, nous explorerons les origines et la genèse du nouveau régime de l’accident devenu un élément fondamental de notre condition moderne.
Entre biologique et numérique : l’accident comme vecteur d’architectures complexes ?
Claire Bailly Architecte paysagiste, enseignante à l’Ecole d’architecture Paris-Vals de Seine
En matière d’architecture, de paysage et d’urbanisme, l’accident ou la catastrophe se traitent désormais par la résilience. Souvent simplifiée, cette dernière émerge soit de simulations numériques discutables soit de techniques environnementales passe-partout. L’éco-quartier répond à la smart city. Une fois de plus, numérique et environnement s’opposent mais ils produisent les mêmes effets de stéréotypie. Pourtant, écologie et digital ont en commun leur capacité à saisir la complexité du monde. La première fait science de la complexité du vivant — où l’accident n’est autre qu’un moteur de diversité et de néguentropie. Le numérique, par data-mining, capture, traite, et rend accessible la complexité ; il constitue également de la néguentropie par deep-learning. Depuis la cybernétique, les sciences du vivant n’ont cessé de fonder leurs méthodes sur la modélisation et l’algorithme. S’y sont développés les concepts d’auto- organisation, de propriétés émergentes, d’effets de seuil, de rétro-action. Ces notions sont le socle de l’écologie et de la vraie résilience ; l’algorithme, lui, permet de les comprendre et de les orienter. Dès lors, comment ne pas réviser nos approches des milieux, naturels ou artificiels ? Comment ne pas ré-interroger la place du numérique, celle du vivant, et leurs relations mutuelles, au sein de nos méthodes de projétation ? Et si l’accident était une clef de nos futures démarches de conception ? Et s’il permettait de reprendre pied dans l’écologie, le numérique et l’humain pour créer de nouvelles résiliences culturelles ?
Fordlândia, retour sur un accident programmé
Littéralement « ville Ford », Fordlândia est une company town que l’industriel américain Henry Ford a implantée au cœur de la forêt amazonienne (1928) pour développer une culture intensive d’hévéas dont il espérait extraire le caoutchouc nécessaire à la fabrication des pneumatiques de ses automobiles. La mauvaise évaluation des conditions agricoles, géographiques et humaines sera responsable de l’échec de ce projet moderne, un accident prévisible qui renvoie à tant d’accidents programmés. En été 2018, le collectif Suspended spaces a organisé une résidence embarquée sur un bateau qui a navigué sur le fleuve Tapajós au Brésil, entre Santarém et Fordlândia. Vingt artistes et chercheurs ont séjourné sur place et travaillé avec les restes des usines, des machines et des maisons, des mémoires et des récits, des fantasmes et peut-être quelques fantômes. Le récit de cette résidence nous permettra de présenter le travail du collectif Suspended spaces, à partir de territoires qui, à l’instar de Fordlândia, fonctionnent comme des paradigmes des accidents de nos modernités.
Lancement de Dromologie remerciement des partenaires
Jac Fol
Élégie à Bernard Stiegler
Chez les Grecs anciens une élégie est un « chant de deuil » teinté de mélancolie. Bernard Stiegler s’est tué le 5 août 2020, il était né le 1er avril 1952. On connait le philosophe inventif, présent sur différents fronts, dont celui du réchauffement climatique ou encore de la collapsologie. Directeur des programmes de recherche au Collège international de philosophie de 1984 à 1992, puis commissaire de l’exposition Mémoires du future, en 1987 au Centre Georges Pompidou, professeur à l’université de technologie de Compiègne, directeur de l’IRCAM en 2002, cofondateur de Ars Industrialis en 2005 et de l’IRI (Institut de Recherche et d’Innovation) l’année suivante. Cela est connu. On sait moins qu’il abandonne le lycée, ou inversement, en seconde, devient agent d’entretien à Sarcelles, où il réside avec ses parents, puis éleveur de chèvres près de Monflanquin, avec sa femme et Barbara, sa fille née en 1971. La sécheresse de 1976 l’oblige à vendre sa ferme et à s’installer à Toulouse où il monte un bar de jazz, L’Écume des jours. Face aux difficultés économiques il braque plusieurs banques, se fait prendre, est condamné à huit temps de prison, en fait cinq. Passe son bac et étudie la philosophie, parrainé par Jacques Derrida, qui dirigera sa thèse, soutenue en 1993… Il popularise le terme grec pharmakon qui désigne aussi bien le poison que le remède. Cette élégie rend hommage à un philosophe subtil, imaginatif qui a sans cesse joué sur cette équivoque, ce qui soigne et ce qui rend malade…
La lenteur comme accident
Équilibre au jardin
Virilio insiste sur le fait que la vitesse n’est pas un progrès. Je partage cet avis pour les raisons évidentes de l’équilibre au jardin : à aucun moment la vitesse ne résout un problème. Il est question de dialogue et non d’une course avec un ensemble vivant. Je n’ai pas trouvé le mot qui conviendrait pour faire écho à la dromologie en parlant du rythme lent du jardinier visant à l’équilibre et non à la performance. Nous vivons une époque de l’inattendu où le vivant nous surprend par sa rapidité de communication. En quelques mois une pandémie locale devient planétaire. La vitesse du déplacement en est sans doute la cause. Ce n’est pourtant pas la vitesse qui va permettre de développer un bon jardinage planétaire face au covid, c’est l’observation des mutations et la justesse des interventions au bon endroit au bon moment. Ce qui nous fait peur est l’inconnu, rapport direct avec le niveau extrême de notre ignorance face aux inovations biologiques. Oui, toujours la vie invente.
Retour sur la 1e pierre