La concertation sur le Grand Paris, dont les résultats sont maintenant exposés et publiés, marque une étape dans l’histoire de la fabrication de la ville. Pour une fois, la primeur est donnée aux images plutôt qu’à la planification ; à l’imaginaire plutôt qu’à la technique. C’est là une habileté politique, les architectes se retrouvant sur le devant de la scène avec des visions urbaines, ce qui n’était pas ou peu arrivé depuis les années soixante et soixante-dix. A l’époque, l’imaginaire, ou la doxa, étaient volontaristes et technicistes, la foi en la technique totale, les ressources et la confiance illimitées. Aujourd’hui, l’air du temps procède plus du développement durable, d’une fusion entre l’homme et la nature, et d’un certain profil bas dans l’inscription de l’homme dans son environnement.

Ce que montre aussi l’exposition, c’est un relatif échec des planifications urbaines à travers le temps, hormis les quelques gestes politiques forts qui ont donné de grandes directions. Contenir la ville, que ce soit dans des limites, dans des zonages, ou dans quelque forme que ce soit, s’avère impossible tant sa matière même est vivante et imprévisible. Enfin, un dernier constat est que la ville, par tradition des métiers qui la pensent (politiques, urbanistes, architectes et ingénieurs), se conçoit presque exclusivement dans l’espace et rarement dans le temps. L’ensemble des plans historiques qui sont rappelés s’expriment par des figures géométriques, des schémas, des formes ou des taches : toutes choses permettant de représenter une organisation dans l’espace. Qu’en est-il de l’organisation dans le temps ? On pourrait arguer que c’est l’affaire du politique : chaque génération conçoit un objectif, ou un idéal pour la ville à atteindre, et il s’agit ensuite de planifier l’action pour y parvenir. Mais dans cette acception, le temps est comme subordonné à l’espace : il n’est qu’un moyen, abstraitement découpé, pour parvenir à la réalisation de la figure urbaine.


Nous pensons que cette dimension du temps est importante et doit maintenant être développée, à l’heure où la planification abstraite dans l’espace, à commencer par celle de l’après-guerre et des années 60-70, de la Charte d’Athènes, a montré ses limites. S’il existe des échelles dans le temps tout comme dans l’espace, il existe aussi des formes temporelles qui peuvent constituer des formes urbaines innovantes.
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