Roberto Casati
DR, CNRS,
Professor, EHESS
Director, Institut Jean Nicod,
Institut Jean Nicod, UMR 8129 (CNRS/ENS/EHESS)
Pavillon jardin — École Normale Supérieure — PSL
29, rue d’Ulm — 75005 Paris
ANR-17-EURE-0017 FrontCog
Member, Academia Europaea
Francesco Pierini
Doctorant
DR, CNRS,
Professor, EHESS
Director, Institut Jean Nicod,
Institut Jean Nicod, UMR 8129 (CNRS/ENS/EHESS)
Pavillon jardin — École Normale Supérieure — PSL
29, rue d’Ulm — 75005 Paris
ANR-17-EURE-0017 FrontCog
Member, Academia Europaea
Francesco Pierini
Doctorant

Tous les accidents sont des événements. Les événements sont des individus concrets, rendus possibles par une transition d’état, qui se produit à un certain moment du temps et de l’espace. Des événements sont produits en permanence, dont certains sont des accidents. Les accidents deviennent contextuellement saillants — en raison de leur gravité, de leur architecture (séquences improbables d’événements improbables), mais beaucoup restent sous le radar.
Tous les accidents sont des événements. Les événements sont des individus concrets, rendus possibles par une transition d’état, qui se produit à un certain moment du temps et de l’espace. Des événements sont produits en permanence, dont certains sont des accidents. Les accidents deviennent contextuellement saillants — en raison de leur gravité, de leur architecture (séquences improbables d’événements improbables), mais beaucoup restent sous le radar.
La nature événementielle des incidents limite leur réutilisation. Montrer un accident dans un musée peut signifier différentes choses : montrer les victimes ou les survivants, montrer les conséquences de l’accident sur un objet, montrer une représentation de l’accident (un film ou une description, un rapport, montrer les causes de l’accident (ou une représentation de celles-ci) — par exemple, un objet dans la balance, dont on voit qu’il va tomber. Les événements ne sont pas reproductibles, donc montrer un accident réel, et non sa représentation, c’est le produire — de manière performative.
La nature événementielle des incidents limite leur réutilisation. Montrer un accident dans un musée peut signifier différentes choses : montrer les victimes ou les survivants, montrer les conséquences de l’accident sur un objet, montrer une représentation de l’accident (un film ou une description, un rapport, montrer les causes de l’accident (ou une représentation de celles-ci) — par exemple, un objet dans la balance, dont on voit qu’il va tomber. Les événements ne sont pas reproductibles, donc montrer un accident réel, et non sa représentation, c’est le produire — de manière performative.
Une salle du musée pourrait contenir des rapports écrits ou imprimés poussiéreux, des rapports techniques, des classeurs poussiéreux contenant des rapports techniques, signalant la sédimentation culturelle des accidents dans les archives — par exemple, celles des compagnies d’assurance ou des commissariats de police.
Une autre salle pourrait rendre hommage à l’invisible. Les règles de sécurité routière ont sauvé deux mille vies par an au cours des vingt dernières années. Où sont ces quarante mille personnes ? Nous ne pouvons pas le savoir, elles sont ontologiquement invisibles, mais elles marchent parmi nous, enfants, mères, amis que nous n’avons pas perdus dans un accident de la route. Ils n’ont qu’une signification statistique, ils ne sont pas visibles en tant qu’individus.
Un aspect important des accidents est leur valeur épistémique. Ils nous permettent de voir une pratique ou un objet social d’un tout nouveau point de vue. Certains incidents célèbres le font d’une certaine manière (ils sont flagrants, un exemple possible étant le 11 septembre : un incident suffit à changer les pratiques de sécurité dans les aéroports). Les incidents moins célèbres et plus courants le font d’une autre manière : par une sédimentation statistique plus subtile et invisible.
Les traces d’accidents se retrouvent dans les « avertissements » apposés sur certains objets du quotidien. Sur les rétroviseurs des voitures américaines, on peut lire « Les objets dans le miroir sont plus proches qu’il n’y paraît. » Sur les chauffages électriques, « Ne pas couvrir ». Bien qu’il s’agisse de messages adressés à l’avenir, ils nous parlent d’un incident passé et réglé.
Une autre salle pourrait rendre hommage à l’invisible. Les règles de sécurité routière ont sauvé deux mille vies par an au cours des vingt dernières années. Où sont ces quarante mille personnes ? Nous ne pouvons pas le savoir, elles sont ontologiquement invisibles, mais elles marchent parmi nous, enfants, mères, amis que nous n’avons pas perdus dans un accident de la route. Ils n’ont qu’une signification statistique, ils ne sont pas visibles en tant qu’individus.
Un aspect important des accidents est leur valeur épistémique. Ils nous permettent de voir une pratique ou un objet social d’un tout nouveau point de vue. Certains incidents célèbres le font d’une certaine manière (ils sont flagrants, un exemple possible étant le 11 septembre : un incident suffit à changer les pratiques de sécurité dans les aéroports). Les incidents moins célèbres et plus courants le font d’une autre manière : par une sédimentation statistique plus subtile et invisible.
Les traces d’accidents se retrouvent dans les « avertissements » apposés sur certains objets du quotidien. Sur les rétroviseurs des voitures américaines, on peut lire « Les objets dans le miroir sont plus proches qu’il n’y paraît. » Sur les chauffages électriques, « Ne pas couvrir ». Bien qu’il s’agisse de messages adressés à l’avenir, ils nous parlent d’un incident passé et réglé.
En complément; ce lien expose les accidents en live (où tombe la foudre en temps réel, etc.)
L'accident de traduction, Jac Fol (2022)