Les documents d’urbanisme sont en France le lieu d’une permanence de l’action publique au plus proche des territoires. C’est par eux que se pense politiquement l’avenir de nos milieux de vie. Tout à la fois projet et règle, la planification urbaine a montré une efficacité relative dans la seconde partie du 20e siècle face à l’enclavement des banlieues et l’étalement pavillonnaire. Si ce type de régulation a fort heureusement vu sa pertinence renforcée par l’introduction de préoccupations sociales et environnementales (loi SRU de 2000 et ENE de 2010), le saut conceptuel était-il suffisant ? Et n’y avait-il pas nécessité d’y intégrer la problématique majeure de notre époque qu’est l’accélération du temps ? Ce changement de point de vue, de l’espace au temps pourrait s’avérer salvateur pour des territoires de plus en plus soumis à l’impermanence tandis que la durabilité exige une pensée à long terme.

I.1. L’accélération du temps social

Le temps, voila la grande affaire de notre modernité tardive. Dans Modern Times, Modern Places (1999), le critique littéraire Peter Conrad plaçait déjà l’accélération du temps comme événement fondamental de la modernité, propos repris ensuite par le sociologue Harmut Rosa dans Accélération, une critique sociale du temps (2010) tandis que le sociologue Zygmunt Bauman dévoilait un Présent liquide (2007) dont l’expérience décisive est celle de la simultanéité d’événements et de processus hétérogènes. Ce nouveau rapport au temps change notre expérience du milieu urbain. Autour de nous, l’espace des flux du géographe David Harvey. Face à nous, un paysage d’événements décrit par le philosophe Paul Virilio. L’espace, en temps que support de nos pratiques sociales, n’a pas fondamentalement changé, mais sa fusion avec le temps modifie considérablement notre manière de l’appréhender. D’une certaine manière, l’accessibilité temporelle remplace la proximité physique comme l’avait prédit Melvin Weber dans The urban Place and the Nonplace Urban Realm (1964).

Une des expressions les plus intéressantes de ce phénomène se trouve être l’invention du chronotope. Employé au début du 20e siècle en analyse littéraire par le linguiste Mikhail Bakhtine, le terme fut repris par les chercheurs du Politecnico di Milano. Cronotopo désigne les activités spatio-temporelles combinant les temporalités propres à la matérialité de la ville et à celles de la société du milieu urbain dans une relation qui leur permet d’habiter l’une dans l’autre. La chercheuse italienne Sandra Bonfiglioli explique à ce sujet que les formes ont chacune leur propre échelle de durée de cycle de vie et sont co-présentes dans le lieu. C’est l’immobilité même de l’architecture, la longue et différente durée des édifices et des lieux construits qui assure la co-présence des différents signes de vie. Le sociologue Henri Lefebvre s’était essayé à une théorie transdisciplinaire des dynamiques temporelles avec sa rythmanalyse identifiant des temporalités et de leurs interrelations.

Si les chercheurs ont très tôt compris le changement de régime spatio-temporel du milieu urbain, quand est-il des architectes ? Les avant-gardes des années 1960 telles que les métabolismes japonais et le groupe anglais Archigram avaient été sensibles à cette question. La théorie métaboliste de déconstruction du temps, entre diachronie et synchronie, se définit comme un processus régénératif entre architecture et planification urbaine où les choses sont considérées comme des formes dans le temps en perpétuelle évolution. En opposition à la planification statique, les métabolistes proposaient de passer du master plan au master program pour lequel différentes voies sont possibles dans l’écoulement du temps pour atteindre des objectifs. Fumihiko Maki allait jusqu’à avancer l’existence de master forms, qui sont au temps ce que les constructions sont à l’espace, proliférerant de manière séquentielle dans un développement autoadaptatif de forme de groupe.

À l’opposé, le groupe Archigram a développé une pensée de la métamorphose où le changement perpétuel s’impose comme une nouvelle permanence et entraîne la modification de nos perceptions. Dans leurs projets emblématiques comme Instant City, la structure de la ville existante est bouleversée par le déferlement d’événements dans un monde de consumabilité planifiée. Le terme de « mode » est performatif, tout comme « éphémère » ou « criard ». Et pourtant, c’est la production de ces objets forcément à la mode, éphémères et criards qui garantit le mieux la vitalité des villes, bien mieux que la construction des monuments. Ces deux tendances simultanées développent deux attitudes radicales que l’on pourrait définir comme une pensée de la durée pour les métabolistes et une pensée de l’instant pour Archigram. Les territoires urbains actuels, pris dans le temps, relèvent bien de ces deux aspects où l’éphémère se combine avec un avenir fait d’alternatives possibles plutôt qu’un projet prédéfini.

I.2. Le temps du plan

Aujourd’hui, le plan d’urbanisme interroge le projet urbain global intégrant les différentes politiques sectorielles telles que les déplacements, l’habitat, l’adaptation au changement climatique ou encore la préservation de la biodiversité. Plurithématique, il ne se réduit pas à la somme de ses parties. D’autant que l’intégration de ces politiques ne s’est pas faite sans mal tant l’horizon du plan se limite à l’espace physique. Après les expérimentations préurbanistique du 19e siècle, le premier traité de planification fut celui d’Urwin développé sur un questionnement purement esthétique d’embellissement du paysage urbain. Le fonctionnalisme qui suivit renforça la statique du plan en développant une vision technicienne de la ville comme l’a ébauché la Charte d’Athènes : il est de la plus urgente nécessité que chaque ville établisse son programme édictant des lois permettant sa réalisation (article 85). Les plans détermineront la structure de chacun de ces secteurs attribués aux quatre fonctions clefs et ils fixeront leur emplacement respectif dans l’ensemble (article 77). La constance de la forme urbaine et sa régularité temporelle par une maîtrise du paysage urbain puis par une dissociation rigoureuse des fonctions étaient pensées dans une trajectoire historique linéaire de la permanence. Malgré les évolutions récentes, nous sommes restés en France sur une planification résolument spatiale.

Il existe une différence significative entre la planification anglo-saxonne et celle pratiquée en Europe continentale. Dans le premier cas, la règle est souple et laisse place à une négociation dans une régulation a posteriori — plan led-system. Nous avons une tradition continentale d’énonciation d’une règle a priori et in abstracto — legally-binding plan systems — qui permet ensuite d’examiner la conformité des projets de construction à celle-ci. La régulation anglaise a basculé à partir des années 1980 dans la négociation où les procédures informelles et préalables sont plus déterminantes que les règlements. La différence est de taille dans un monde mouvant. La modernité du plan d’urbanisme tel que nous le connaissons se heurte de fait à l’invention de la période moderne : l’émergence du temps comme nouveau support de la vie sociale. Dans Espace, temps, architecture, Siegfried Giedon affirmait qu’au lieu d’un plan général, comme on en dressait au début du siècle, l’urbanisme nécessite à l’heure actuelle un programme général flexible, capable de tenir compte des changements temporels, c’est-à-dire de laisser porte ouverte au hasard. Ouvrir le Plan consiste d’une part à reconnaître les territoires du temps que sont les chronotopes et d’autre part à interroger nos mécanismes de régulation.


II.1. Le temps des confusions

La formidable explosion urbaine de certaines régions du monde — le continent asiatique en tête — permet de penser de l’impermanence urbaine. La lente sédimentation et la préservation historique tel que nous les envisageons laissent place à une obsolescence architecturale très contemporaine et ouverte au changement perpétuel. Dans un contexte occidental plus conservateur, quelle place laissons-nous à l’impermanence comme changement bénéfique ?

Selon Harmut Rosa, la politique n’apparaît plus pour beaucoup comme un élément de progrès, mais comme un frein à la modernisation. En réaction, une mouvance est apparue aux États-Unis avec l’urbanisme temporaire. Pop-up shops, espaces publics provisoires et autres performances fleurissent comme autant de réponses à l’espace des flux. Face à la crise et las d’attendre une réaction des pouvoirs publics, des citoyens organisent des actions collectives et éphémères amplifiées par les réseaux sociaux. L’urbanisme temporaire remet en question la permanence même de l’architecture comme réponse adaptée aux besoins sociaux. Si nous connaissons en France les Park (ding) Days, le mouvement est bien plus important : les San Francisco’s Pavement to Parks et New York’s gutter cafes sont des espaces publics temporaires, le groupe Build a Better Block de Dallas qui attire l’attention sur des changements possibles par de simples inscriptions à la peinture sur le sol urbain, Brooklyn’s de Kalb Market et San Francisco’s PROXY proposent pour une durée limitée des fonctions urbaines dans des containers en espérant une pérennisation. Ces expérimentations d’initiative populaire se font sans plan préconçu à partir de valeurs urbaines telles que la proximité et la marchabilité. Ce DIY — do it yourself — appartient à une philosophie de l’action en mettant en avant un bricolage politique et technique. Il devient urbanisme tactique lorsque les tentatives éphémères servent de tests à des aménagements permanents ou font naître un débat de société. Le phénomène se place à la fois dans un urbanisme de l’instant par sa spontanéité et dans une logique de sédimentation sociale en montrant pragmatiquement des voies possibles d’innovation urbaines.

Plus généralement, la participation du public répond à une attente de renouveau démocratique dans un contexte marqué par la crise de la représentation traditionnelle, le développement des réseaux sociaux et la répartition des compétences entre les partenaires institutionnels. Dans la modernité tardive, la société s’invente une représentation citoyenne au moyen de la participation. Dans le domaine plus spécifique de l’urbanisme, l’advocacy planning avait émergé aux États-Unis dès les années 1960 en faisant entrer dans les réflexions la maîtrise d’usage des habitants. La contre-expertise citoyenne, accompagnée par des professionnels, a pu donner lieu à des plans alternatifs et partagés influençant ceux initialement prévus par les autorités publiques. À l’exception des Ateliers populaires d’urbanisme, de telles pratiques participatives ne sont malheureusement pas expérimentées en France sur des démarches de planification.

Or l’élaboration d’un document d’urbanisme pourrait acquérir une légitimité rénovée d’une co-construction du projet de territoire. Le rythme même d’élaboration puis celui d’application des plans locaux d’urbanisme pourraient être confrontés à un dialogue suivi avec la population dépassant très largement l’évaluation réglementaire. Ces pratiques apparaissent pertinentes dans le cadre d’une régulation a priori. L’accélération du temps social soutend une fluctuation des chronotopes dont la population à la maîtrise d’usage.

II.2. L’ouverture du plan

Comme l’explique Harmut Rosa, la dérégulation et la désinstitutionnalisation temporelles augmentent massivement les exigences de planification, et donc de temps nécessaires à la coordination et à la synchronisation des séquences d’action quotidiennes. Si l’on part du principe que le projet urbain unifie les chronotopes urbains, on comprend aisément que le projet devient beaucoup plus complexe, nécessite un surcroît d’informations, et demandent par conséquent beaucoup de temps et d’énergie.

L’urbaniste Bernardo Secchi répond à cela avec beaucoup d’élégance. D’une part, il annonce à l’ère contemporaine, l’accélération du temps implique une sorte de stratégie du ralentissement ; autrement dit les différentes formes du projet urbanistique restent composées de scénarios situés à l’intérieur de l’axe temporel. Les scénarios et les stratégies établissent, en effet une distance à l’intérieur de laquelle se situe le projet de la ville, le plan et les politiques urbaines. Et d’autre part que la ville contemporaine, au contraire, avec son caractère instable et toujours inachevé, invite (comme l’avait déjà fait la ville moderne à ses débuts) au doute, a l’exploration et l’expérimentation ; elle nécessite des projets beaucoup plus ouverts et de dispositifs beaucoup plus structurés et stratifiés que ceux que l’on avait imaginés pour la ville moderne. Le projet de la ville (avant d’être traduit dans des prescriptions et des plans) doit se constituer comme une « charte » sur la base de laquelle on peut sceller un pacte entre l’administration et les citoyens.

Dès lors, le plan s’ouvre en proposant des potentialités scénarisées pour répondre à l’instabilité urbaine contemporaine. D’autre part, la participation citoyenne devient le socle du projet puisque les chronotopes qui sont justement façonnés par les pratiques sociales. Si nous reprenons la définition des termes, le programme est un ensemble des actions qu’on se propose d’accomplir dans un but déterminé tandis que le plan est un projet élaboré, comportant une suite ordonnée d’opérations, en vue de réaliser une action ou une série d’actions. Il nous faut définitivement passer d’une planification de programme à une planification de projet. Le projet doit être partagé avec la population et compris comme un master program flexible pour atteindre les objectifs fixés.

Une quantité est dite linéaire si sa taille totale est la somme des tailles de ses parties, sinon elle est dite non linéaire. Or, pour reprendre une métaphore astronomique, quand la courbure de l’espace-temps est faible, son comportement est pratiquement linéaire (…) Au contraire, quand la courbure de l’espace-temps est forte, les lois de la relativité générale d’Einstein précisent que la courbure de l’espace-temps doit être extrêmement non linéaire. Il se peut qu’il en aille de même pour la ville des chronotopes. L’urbanisme du quotidien, celui des quartiers constitués à faible évolution, répond a une logique linéaire. Mais dès que nous approchons d’un accident temporel — une zone de désynchronisation de pratiques, le devenir d’une friche — la courbure de l’espace-temps des chronotopes s’accentue et renforce le besoin de planification. Il existe donc un enjeu considérable à identification des secteurs d’enjeux, à partir de l’analyse des chronotopes et de l’expertise d’usage des habitants. Dès lors, profitant de la courbure spécifique de ces espaces-temps, on peut imaginer une place plus grande laissée à la négociation, allant à l’encontre de notre régulation a priori. L’ouverture du plan s’accompagne donc d’une modification réglementaire importante. Mais saisir l’espace-temps urbain consiste à analyser les chronotopes en mouvement tout en proposant une organisation pour interagir sur cette évolution. Cette vision fusionne les phénomènes et les processus.

S’inscrire dans la courbure du temps

En conclusion, Melvin Weber énonçait dès 1964 que c’est l’interaction et non le lieu qui est l’essence de la ville et de la vie en ville. La durabilité de la planification urbaine n’est que secondairement la continuité d’une action territoriale dans le temps ; elle indique bien plus un enchaînement de significations s’organisant autour de la notion de projet partagé, et devient le cadre à partir duquel un grand nombre d’actions urbaines se coordonnent. Le développement durable interroge notre capacité à maintenir dans le temps des potentialités d’action alors que l’impermanence domine. La durabilité s’exprime alors dans la continuité des processus et non des objets. 
Crédits de l’article
Mars 2014

Revue le Pilotope, la revue du réseau scientifique thématique Philau, n° 10
L’approche temporelle en urbanisme
Qu’est-ce que la durabilité ? La qualité de ce qui est durable ; espace de temps durant lequel un bien est apte à satisfaire un besoin auquel il correspond ; durée au-delà de laquelle il n’est plus rentable de maintenir en état un équipement. Synon. permanence, pérennité, persistance.
Les politiques temporelles précédemment décrites font partie du développement durable et il convient maintenant de s’interroger sur leur intégration dans la planification.
Plan souple/plan temporel. Dans « Espace, temps, architecture », Siegfried GIEDON écrit « qu’on a pris parfaitement conscience du fait qu’il faut répondre simultanément à des besoins fort divers et qu’il est nécessaire de faire de la ville un “champ dynamique” de forces corrélatives et interdépendantes […]. Au lieu d’un plan général, comme on en dressait au début du siècle, l’urbanisme exige à l’heure actuelle un programme général flexible, capable de tenir compte des changements temporels, c’est-à-dire de laisser la porte ouverte au hasard » 63. D’autres auteurs, tels que le célèbre urbaniste américain Kevin Lynch, vont même plus loin :
« On pourrait dresser la carte de la densité et de la nature des signes du temps dans une région. Elle comporterait des références au passé reconnaissables par une personne bien informée : bâtiments anciens, ruines, inscriptions, monuments, cimetières, vieux arbres, activités traditionnelles, etc. Y seraient également indiqués les endroits où on peut relever les heures du jour ou la saison, et où existent des signes perceptibles d’événements à venir : activités préparatoires, tendances visibles, communication des intentions futures, etc. Une telle carte servirait à l’amélioration de la communication officielle du temps. Des enquêtes de ce genre restent à faire. Jusqu’à présent, l’intérêt pour la forme temporelle s’est concentré exclusivement sur la conservation des bâtiments et des sites anciens.
Le rythme général d’utilisation et d’appartenance peut être également schématisé : les endroits qui fonctionnent vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ceux qui se prêtent à des activités diurnes, les lieux de vacances ou ceux dont l’apparence subit manifestement des changements cycliques réguliers. Le personnel de planification peut effectuer cette schématisation soit parce qu’il songe à faire une utilisation plus suivie de l’espace public, soit parce qu’il veut encourager les concentrations d’activités qui coïncident dans le temps. Un relevé des cycles d’activités peut faire apparaître des insuffisances marquées, un manque d’harmonie ou des conflits dans l’occupation temporelle des espaces ».
Nous voyons par là que l’inscription du temps dans la planification urbaine possède une antériorité même si peu d’applications concrètes ont été tentées.
Planification urbaine & développement durable. Si en France, le rapprochement tombe sous le sens depuis la loi Engagement national pour l’environnement de 2010, il ne faut pas oublier que la loi d’orientation pour l’Aménagement et le développement durable du territoire de 1999, suivie de la loi de Solidarité et du renouvellement urbain de 2000, avait ouvert la voie d’une territorialisation de l’action publique en faveur du développement durable. Nous insisterons ici juste sur deux points : d’une part, la planification urbaine, par son approche plurithématique des temps longs, intègre les politiques environnementales entrant dans le champ du développement durable autant qu’elle intègre les deux autres piliers que sont l’économie et le social ; d’autre part la planification urbaine apparaît au côté des Agendas 21 (issus du second sommet de la terre à Rio en 1982) comme le moyen le plus efficace pour territorialiser une politique de développement durable en étant de plus opposable aux tiers.
Durabilité. La durabilité interroge de manière inédite la question si prégnante de l’obsolescence dans notre société, donc de la finitude et du recyclage. Le temps s’est décomposé au point de rendre impossible toute vision linéaire de nos actions et bien entendu de la prévision urbaine. Or le développement durable interroge « notre capacité à fortement maintenir dans l’espace et dans le temps des potentialités d’action alors que le temps se dérobe sous nos pas ». Sandra Mallet rappelle à ce sujet une controverse philosophe : « [Gaston Bachelard] s’oppose à la théorie d’un de ces contemporains, le philosophe Henri Bergson, selon laquelle seule la durée est réalité temporelle, c’est-à-dire temps vécu, l’instant n’étant qu’une possibilité de découpage abstrait du temps. À l’inverse, le philosophe champenois pense que “le temps n’a qu’une réalité, celle de l’instant”. Dès lors, durée et permanence ne sont qu’illusions et il démontre la structuration discontinue de la durée. Il conçoit le temps comme étant marqué par l’hétérogène, comme un ordre pluriel ». Cette controverse sur la nature de la durée faite d’un temps vécu pour l’un et d’une somme d’instants sans durée pour l’autre redéfinit la continuité. Bachelard identifia cette continuité comme une continuité fictive faite d’une multiplicité d’instants prise entre des intervalles de néant. Il se peut que la durabilité s’exprime dans la continuité de cycles de production, de destruction, et de réemploi de la ville et qu’elle se place au niveau d’un processus général et non de la longévité des objets. La nature rythmique de la durabilité qui ne serait pas constituée par la pérennité des intentions suivies d’actions, mais par l’impermanence d’un renouvellement incessant.
Dans cette définition émergente, la durabilité appliquée à la planification serait de deux ordres : d’une part le réajustement incessant de l’action publique pour atteindre des objectifs à long terme et d’autre part l’attention portée aux actions concrètes en cours pouvant réorienter le court du projet planificateur. Dans cette optique, le retour d’expérience comme processus d’évaluation des politiques publiques d’aménagement apparaît comme particulièrement opérationnel.
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